« Pour qu’un cancer pulmonaire ou pleural soit indemnisé, il faut d’abord un diagnostic précis »

On peut avoir été exposé à l’amiante, avoir un cancer du poumon ou de la plèvre et se voir refuser une indemnisation si les médecins considèrent qu’il s’agit d’une métastase et non d’un cancer primitif. Le diagnostic précis du cancer peut donc avoir une énorme importance pour une victime ou sa famille. Il repose sur des techniques sophistiquées et soulève des problèmes d’interprétation. Le docteur Lucien Privet les aborde ici, en s’efforçant de les rendre accessibles à des non médecins.

Comment distinguer un cancer primitif d’une métastase ?

Quelle est l’utilité d’un diagnostic ?

Il doit permettre de répondre à deux questions importantes :

1) S’agit-il d’une tumeur cancéreuse ou d’une autre pathologie ?

2) S’agit-il d’un cancer primitif du poumon ou de la plèvre ou bien s’agit-il d’une métastase d’un cancer qui a pris naissance dans un autre organe ?

La réponse est importantes pour définir une stratégie médicale face à la maladie, mais aussi pour obtenir qu’elle soit indemnisée.

Quel est l’outil privilégié pour ce diagnostic ?

C’est l’examen anatomo-pathologique, c’est-à-dire l’examen au microscope, de tissus prélevés sur la tumeur.

Le médecin prescrit souvent cet examen après avoir vu des images suspectes sur un scanner.

Comment ces tissus sont-ils prélevés ?

Si la tumeur a été opérée, on réalise cet examen sur la pièce opératoire retirée par le chirurgien.

Si ce n’est pas le cas, on réalise une biopsie. Pour cela on fait une fibroscopie bronchique dans le cas d’un cancer du poumon, ou une thoracoscopie dans le cas d’un cancer de la plèvre (la tumeur est vue directement en utilisant les propriétés des fibres optiques). Lors de cet examen, un morceau de la tumeur est prélevé.

Quels sont les divers types de cancers du poumon et de la plèvre liés à l’amiante ?

Le cancer broncho-pulmonaire peut être un carcinome épidermoïde, un adénocarcinome, un carcinome à petites cellules ou un carcinome à grandes cellules. On oppose les carcinomes à petites cellules aux carcinomes « non à petites cellules ». Le cancer de la plèvre (qui enveloppe du poumon) est le mésothéliome.

Quelle est la différence entre un cancer primitif et une métastase ?

Les premières cellules cancéreuse apparaissent sur un organe. Quand la tumeur se développe, elles peuvent migrer ailleurs.

Le poumon et la plèvre sont des lieux où se fixent fréquemment des métastases.

Des cellules cancéreuses prélevées sur le poumon peuvent donc venir d’un cancer d’une autre région (notamment chez l’homme : prostate, côlon, rein …)

Le problème peut donc se poser de savoir si la tumeur vue au scanner au niveau du poumon est un cancer primitif ou un cancer secondaire (métastase).

La question devient cruciale au niveau de la plèvre. Le cancer s’y manifeste souvent par une pleurésie (ou épanchement pleural), mais le mésothéliome ne représente qu’un faible pourcentage des cas. Dans les autres cas il s’agit d’une métastase provenant d’un cancer du poumon ou d’un autre organe.

En matière d’indemnisation, quelle est la conséquence de cette différence de diagnostic entre « cancer primitif » et « métastase » ?

Pour un cancer de la plèvre chez une personne ayant été exposée à l’amiante :

- S’il s’agit d’un mésothéliome pleural primitif, elle pourra être indemnisée.

- S’il s’agit d’une métastase pleurale d’un cancer broncho-pulmonaire, elle pourra être indemnisée, à condition que les critères d’exposition soient remplis.

- S’il s’agit d’une métastase d’un cancer né dans une autre région que le poumon ou la plèvre, elle ne touchera aucune indemnisation, (sauf à démontrer qu’il existe un lien entre l’amiante et ce cancer extra-pulmonaire)

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Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°36 (septembre 2011)