Le Fiva est l’une des conquêtes les plus importantes des victimes de l’amiante depuis une décennie.
Avant lui, un artisan ou une victime environnementale ne pouvait pas être indemnisé.

Avant lui, les victimes professionnelles qui ne pouvaient démontrer l’existence d’une faute de l’employeur ne pouvaient obtenir réparation de tous leurs préjudices.

Le principe fondateur du Fiva, c’est la réparation intégrale de tous les préjudices de toutes les victimes professionnelles ou environnementales et de tous leurs ayants droit.

Le Fiva a versé 385 millions d’euros d’indemnisation en 2010 et 2,7 milliards d’euros depuis sa création. La prescription est passée de 4 ans à 10 ans, grâce à l’action des associations et des syndicats.

Ces avancées sociales, que les victimes de l’amiante d’autres pays nous envient, ont été rendues possibles grâce à l’action de l’Andeva et de ses représentants au conseil d’administration, où tous les choix importants on dû être expliqués et débattus.

C’est ce fonctionnement que veut remettre en cause le gouvernement pour préparer une baisse des indemnisations Une bonne raison de le défendre. Bec et ongles.


 

FNATH - ANDEVA : UNE MÊME EXIGENCE : TOUCHE PAS AU FIVA !

Dès que le projet de décret a été connu, la Fédération des accidentés de la vie (Fnath) et l’Andeva ont fait la même appréciation de la gravité des enjeux pour les victimes de l’amiante. Dès lors, tous les communiqués, toutes les mobilisations contre ce décret ont été menés en commun.

« Présentée comme une mesure technique anodine, la modification de la gouvernance du Fiva prépare en fait une baisse des indemnisations »

L’actuel conseil d’administration du Fiva.

Il a un rôle important : c’est lui qui définit le montant et les critères d’indemnisation, les procédures, les conditions de reconnaissance de l’exposition à l’amiante, les actions judiciaires du Fonds…

Le conseil d’administration a 22 membres, avec une composition originale qui préserve un équilibre entre les « payeurs » et les victimes.

Les « payeurs » ont actuellement 10 voix : 5 représentants de l’Etat, 3 représentants des employeurs, le directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie, un représentant de l’inspection générale des Affaires sociales.
Les représentants des victimes et des salariés ont 9 voix : 5 représentants des organisations syndicales (Cgt, Cfdt, Cftc, Fo, Cfe-Cgc),
4 représentants des associations de victimes (2 Andeva et 2 Fnath)
S’y ajoutent 2 personnalités qualifiées ayant des connaissances particulières sur l’amiante.
Le président est un magistrat de l’ordre judiciaire, indépendant du pouvoir.
En cas d’égalité, il a voix prépondérante. Il joue ainsi en quelque sorte un rôle d’arbitre entre payeurs et victimes.

En créant le Fiva, le législateur a choisi de confier cette fonction à un président de chambre de la Cour de cassation.
Ce choix n’était pas fortuit. En plaçant à la présidence de cet établissement public un magistrat de l’ordre judiciaire, il marquait sa volonté de privilégier deux critères essentiels : l’indépendance par rapport au pouvoir politique et la compétence en droit civil.
Ces critères étaient d’autant plus justifiés que le Fiva avait pour but d’éviter des procédures judiciaires éprouvantes pour les victimes et coûteuses pour la collectivité. Il remplaçait ainsi un premier degré de juridiction.

Ce que le gouvernement veut changer

Le gouvernement veut se fabriquer une majorité permanente au conseil d’administration, et avoir ainsi les mains libres pour « normaliser » cette instance et préparer une baisse le montant des indemnisations.
Pour cela, il avait prévu deux moyens : augmenter le nombre de représentants du patronat et avoir un président acquis aux orientations du pouvoir.

Au nom du respect de la « parité », la première version du décret donnait deux voix supplémentaires aux employeurs. Cette sur-représentation délibérée des « payeurs », qui sont aussi les responsables de la catastrophe sanitaire a provoqué un véritable haut-le-cœur chez les victimes.
Le gouvernement a dû y renoncer, mais il a conservé la disposition la plus importante du décret : la possibilité de recruter le président du conseil d’administration non plus seulement à la cour de cassation, mais aussi au conseil d’Etat ou à la cour des comptes.

Cette disposition a été présentée comme une mesure technique anodine visant à « élargir le vivier de recrutement » du président à d’autres magistrats (comme s’il y avait pénurie de candidats à la cour de cassation !)
En réalité, les seuls magistrats, au sens constitutionnel du terme, sont ceux de l’ordre judiciaire, qui sont indépendants du pouvoir exécutif.
Les magistrats de l’ordre administratif ne sont pas indépendants de l’exécutif. Ils sont nommés par lui. Cela change tout.

Si demain, au conseil d’administration, le président vote systématiquement avec les représentants de l’Etat, les représentants des victimes et des salariés n’auront plus voix au chapitre. La voie sera ouverte pour une baisse des indemnisations


 

Des justifications embarrassées et incohérentes

En réponse à des questions de Jean-Pierre Door et Christian Hutin à l’assemblée, le 28 juin, Xavier Bertrand a donné une étonnante justification de ce décret : présider le Fonds est, selon lui, « devenu quasiment une fonction à plein temps et nous ne pouvons pas garantir qu’un seul membre de la Cour de cassation aura toute disponibilité pour le faire ! »

L’argument est fallacieux. L’administration du Fiva est exercée par sa directrice. La fonction du président est de présider le conseil d’administration qui se réunit quatre ou cinq fois par an. Une fonction clé, mais peu mangeuse de temps. Le but réel est la reprise en main du C.A. du Fiva, en nommant un président acquis aux orientations du pouvoir


 

Une mobilisation sans précédent de toute l’Andeva

Le danger a été immédiatement perçu par toutes les associations locales. Au C.A. de l’Andeva, le 28 mai, l’ambiance était grave et déterminée. Des actions fortes ont été décidées.

Le 21 juin a eu lieu une occupation surprise du Fiva, le 28 juin un rassemblement devant le Fiva le jour de son conseil d’administration.
Les associations ont organisé des rassemblements devant les préfectures, diffusé l’information à leurs adhérents, alerté les députés et les sénateurs locaux, informé les organisations syndicales… Pas besoin de longues explications pour saisir la gravité de la situation.

La manifestation de rentrée des victimes de l’amiante a lieu habituellement à Paris. L’AG du 25 juin de l’Andeva a décidé qu’elle aurait lieu le 15 octobre à Saint-Quentin, ville dont Xavier Bertrand est maire, si le projet de décret n’est pas retiré. A l’heure où nous bouclons ce numéro, le décret n’est pas paru mais le gouvernement n’a pas exprimé la volonté de le retirer.


 

28 JUIN Les victimes de l’amiante s’invitent au conseil d’administration du Fiva

A l’appel de l’Andeva et de la Fnath, deux cent personnes se massent devant l’entrée du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante à Bagnolet pour demander l’annulation du projet de décret modifiant la gouvernance du Fiva

Une délégation de la Fnath , de l’Andeva et des associations locales de défense des victimes de l’amiante est reçue par le conseil d’administration du Fiva, qui se réunit ce jour-là. Elle réaffirme son désaccord total avec le projet de décret.

A son retour, la délégation fait un compte rendu à toutes celles et ceux qui sont venus, parfois de très loin pour exprimer leur opposition au projet de décret et leur colère en participant à ce rassemblement.


 

Chronologie

Fin mai : L’Andeva est informée du de décret

25 mai : rencontre avec le ministère et la DGT

28 mai : C.A. de l’Andeva, plan de mobilisation.

2 juin : Lettre Andeva-Fnath à Xavier Bertrand

7 juin : communiqué de presse

8 juin : le gouvernement renonce à donner au Medef 2 postes de plus au CA du Fiva, mais maintient le reste du projet

Juin : interventions des associations auprès des préfets, des députés et sénateurs

13 juin : lettre aux syndicats

14-15 et 16 juin : Actions à Saint-Nazaire, Macon, Dunkerque, Istres, Riom, Périgueux,Valencienne, Metz, Le Mans...

21 juin : les syndicats « prennent acte » du décret 21 juin : occupation du Fiva

21 juin : communiqué de presse

25 juin : A.G. de l’Andeva, manifestation en octobre à Saint-Quentin si décret maintenu

27 juin : communiqué de presse

28 juin : à l’Assemblée, 2 questions posées par Jean-Pierre Door (majorité), et Christian Hutin (opposition)

28 juin : lettre à Xavier Bertrand

28 juin : 200 personnes devant le Fiva. Une délégation est reçue par le C.A.


Articles parus dans le bulletin de l’Andeva n°36 (septembre 2011)