Jacques Barrot avait rattrapé en 1996 le retard de France sur les pays voisins en matière de prévention du risque amiante avec le décret d’interdiction de la commercialisation de l’amiante et les réglementations concernant la protection des travailleurs et des populations contre les risques liés à la présence d’amiante dans les bâtiments. Martine Aubry avait dans la foulée créé le dispositif de réparation des conséquences de l’exposition à l’amiante le plus avancé au monde avec l’allocation de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante (Acaata) en 1999 et le fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva) en 2001.

Depuis, les gouvernements successifs ont mis le pied sur le frein. Mais avec François Fillon et Xavier Bertrand nous avons franchi un cap : celui du grand pas en arrière ! Aussi bien en matière de prévention que de réparation.

Une amélioration du dispositif de protection des populations contre les risques liés à la présence d’amiante dans les bâtiments était en chantier depuis plusieurs années. Les seuils d’empoussièrement déclanchant les travaux devaient être abaissés, les fibres courtes d’amiante devaient être prises en compte, l’obligation de désamiantage être étendue à d’autres matériaux que les flocages et calorifugeages, … A l’arrivée, rien de tout cela, mais un vrai recul : les propriétaires de grands bâtiments pourront désormais prendre tout leur temps pour désamianter.

Mais la remise en cause la plus spectaculaire concerne le Fiva, organisme original et emblématique, acquis de haute lutte par les victimes. Les principes et montants des indemnisations sont décidés par son Conseil d’Administration qui a été conçu comme un premier degré de juridiction : il est présidé par un magistrat indépendant, membre de la Cour de Cassation, et repose sur un équilibre entre les parties : ni les représentants des « payeurs » (État et employeurs), ni les ceux des « bénéficiaires » (Associations de victimes et organisations syndicales de salariés) ne disposent de la majorité. Le président indépendant joue le rôle d’arbitre.
Le gouvernement ne veut plus de cette situation. Il ne veut plus d’un Fiva présidé par un magistrat indépendant. Il veut un président aux ordres qui assurera aux « payeurs » une majorité automatique. Une première version du projet décret allait même jusqu’à ajouter deux sièges supplémentaires au Medef ! L’Andeva et la Fnath ont immédiatement réagi en annonçant qu’elles ne siègeraient plus dans un tel conseil. Xavier Bertrand a été obligé de revoir sa copie. Il a supprimé les deux épines du Medef, mais il a gardé le venin : le président ne sera plus un magistrat indépendant.

Cette nouvelle composition est clairement le prélude à une baisse des indemnisations.
C’est aussi un véritable déni du droit des victimes à une réparation intégrale de leurs préjudices, prévu par loi.
Comment peut-on simplement imaginer de donner aux « payeurs » - qui sont aussi les responsables de la catastrophe sanitaire – le droit de décider librement du montant des indemnisations des victimes ? Si à l’inverse, on donnait aux victimes le droit de décider librement du montant de leurs indemnisations, qu’en diraient les payeurs ?

Les victimes de l’amiante et leurs associations ont averti le gouvernement et Xavier Bertrand : elles ne les laisseront pas remettre en cause le Fonds d’Indemnisation et leur livreront une bataille acharnée.
Pour commencer, le 15 octobre, la manifestation nationale des victimes de l’amiante se tiendra à Saint Quentin, sous les fenêtres de Xavier Bertrand !

Michel PARIGOT

Tous à Saint-Quentin le 15 octobre !