Avocat des ex-salariés de ZF Masson et de l’Ahlstrom, maître Jean-Paul Teissonnière commente le jugement rendu par la cour d’appel de Paris :
« Cet arrêt fait franchir une nouvelle étape au droit à la santé et à la sécurité au travail. Il ajoute à la conception classique de la responsabilité fondée sur la réparation du dommage corporel, un nouveau principe de responsabilité fondé non plus sur la réparation du dommage mais sur la prévention. »

Comme dans une procédure pour « mise en danger d’autrui » au pénal, ce qui est ici un délit pour les prud’hommes au civil, ce n’est pas un dommage réalisé (une maladie), c’est le non respect par l’employeur de son obligation de sécurité de résultat, qui risque d’avoir comme conséquence lointaine la survenue d’un maladie grave et a comme conséquences immédiates une anxiété et des bouleversements dans l’existence dus à la menace d’une vie abrégée.

Cet arrêt peut, si la jurisprudence se consolide, fournir un formidable outil aux organisations syndicales et aux élus dans les CHSCT confrontés à des produits cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques (CMR), dont les effets différés peuvent n’apparaître que plusieurs décennies après l’exposition.
Sans attendre la survenue d’une maladie, ils peuvent, à condition d’avoir un dossier solide, saisir le conseil de prud’hommes pour rappeler à leur employeur ses obligations en matière de prévention et lui faire comprendre que le non respect de la santé de ses salariés a un coût
Il faut aussi tirer toutes les conséquences de cet arrêt en matière de réparation des préjudices subis par les victimes de maladies professionnelles.

Pour Jean-Paul Teissonnière « Le montant total atteint (27 000 Euros) doit inciter à une réévaluation des indemnisations des victimes de dommages corporels dont les effets en terme de souffrance physique et morale, de perte d’agrément et d’incapacité sont autant de facteurs qui s’ajoutent au préjudice résultant du seul fait de la contamination. »

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Article paru dans le bulletin de l’Andeva n°38 (janvier 2012)