Elle avait été injustement dessaisie d’une instruction qu’elle menait depuis 10 ans

« Si on me donnait les moyens, l’instruction pourrait
être terminée dans un an. Mais le voudra-t-on ? »


Mme Bertella-Geffroy instruit une vingtaine de dossiers amiante au pénal, dont celui d’Eternit.

Poursuite des mises en examen

La juge a mis en examen des membre du CPA, structure de lobbying créée et financée par les industriels de l’amiante pour retarder son interdiction : J-P Hulot, PDG de la Société CES, Dominique Moyen, directeur de l’INRS, Daniel Bouige, directeur des associations française et internationale de l’amiante, Arnaud Peirani du ministère de l’Industrie et expert à la Commission européenne, Jean-Luc Pasquier, du ministère du Travail et - plus récemment - le pneumologue Patrick Brochard.

Interviewée par un journaliste du Parisien, Madame Bertella Geffroy a déploré «  l’isolement du juge et son manque total de moyens propres, malgré la création d’un pôle de santé quasi national, et sa
dépendance vis-à-vis du ministère de l’Intérieur décidant du nombre d’enquêteurs de police judiciaire, policiers ou gendarmes affectés à tel ou tel dossier. L’amiante n’est manifestement pas pour lui la priorité
. »

L’indifférence du parquet

Elle critique «  l’indifférence voire l’opposition du parquet français à l’instruction de tels dossiers de santé publique, parquet, qui contrairement au parquet italien, est dépendant directement du ministère de la Justice. Pour le ministère public français, ces affaires de santé publique sont trop complexes et spécialisées, avec de trop nombreuses victimes et qui nécessitent trop de moyens et trop de délais d’instruction et de jugement. »

Ses demandes ? « Si on me donne, pour la vingtaine de dossier d’amiante de mon cabinet, la co-saisine de deux magistrats (…), deux enquêteurs judiciaires ayant déjà travaillé dans ces dossiers, deux assistants de justice et un médecin ou un inspecteur du travail, ces procédures pourraient être terminées dans un an. Mais le voudra-t-on ? »

Les limites du Code pénal

Madame Bertella-Geffroy critique «  l’inadaptation des seules qualifications juridiques d’ « homicide et blessures involontaires » applicables dans ce type de dossier et la non prise en compte en France du caractère collectif de ces catastrophes qui ne sont appréhendées que comme une succession d’accidents individuels.
 
Une récente loi dite loi Fauchon a rendu ces infractions encore plus difficilement applicables aux catastrophes sanitaires et a eu pour effet les contestations presque systématiques de son application par les avocats de la défense. 
 »


Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°40 (septembre 2012)