Le Tribunal Suprême fédéral fait du sur-place

Un mouvement favorable à l’interdiction de l’amiante se développe aujourd’hui au Brésil. Il a marqué des points avec l’interdiction de l’amiante dans l’état du Minas Gerais et avec de lourdes condamnations infligées par la Justice à Eternit Brasil. Mais l’Etat fédéral brésilien n’a toujours pas interdit l’amiante dans l’ensemble du pays et l’on assiste à présent à un enlisement de la bataille juridique au sommet sur l’amiante engagée il y a deux ans au Tribunal suprême fédéral .

Un fort mouvement
en faveur de
l’interdiction

Les gouverneurs de six états - le Brésil est une fédération d’états - ont édicté des lois interdisant l’amiante sur les territoires qui sont sous leur juridiction : Rio de Janeiro, Rio Grande do Sul, São Paulo, Pernambuco, Mato Grosso et, tout récemment, l’état de Minas Gerais.
Des pétitions citoyennes et propositions de loi en faveur de l’interdiction de l’amiante sont en cours de discussion dans plusieurs états dont ceux de Santa Catarina, Ceará et Paraná.
Le groupe Eternit Brasil a maintenant de plus en plus de déboires avec la justice qui le condamne régulièrement à payer des indemnités aux ouvriers qui sont malades de l’amiante. Elle le condamne aussi à des amendes record pour absence de déclaration de maladies professionnelles.

Enfin deux procureurs du ministère du travail ont entamé une procédure devant le Suprême Tribunal Fédéral contre la loi de 1995 régissant l’usage contrôlé de l’amiante qu’ils considèrent comme contraire au droit des travailleurs à la santé, reconnu dans la constitution brésilienne.

La stratégie
d’Eternit   : retarder l’échéance pour vendre encore

Eternit Brasil finance depuis des années l’«  Instituto Brasileiro do Crisotila  » (IBC). Il a été créé sur le modèle et avec l’aide de l’«  Institut de l’amiante  » de Montréal (rebaptisé «  Institut du chrysotile  » en 2003 pour les besoins de propagande). L’institut canadien a fermé ses portes en avril 2012, mais l’institut brésilien continue sa propagande et sa corruption. Ainsi plusieurs des escrocs attitrés de l’institut canadien ont été invités à témoigner devant le Suprême Tribunal Fédéral en août 2012, notamment David Bernstein, Jacques Dunnigan et Thomas Hesterberg.

De son côté Eternit et l’IBC ont déposé des recours auprès du Suprême Tribunal Fédéral pour annuler les décisions d’interdiction de l’amiante, alléguant qu’elles seraient contraires à la loi fédérale de 1995.
En fait les dirigeants d’Eternit savent bien qu’ils ne pourront pas continuer éternellement à vendre de l’amiante et que leur commerce mortifère est condamné, mais ils tentent de retarder l’échéance, espèrant ainsi parvenir à vendre de l’amiante et engranger des profits pendant quelques années.

Au Tribunal Suprême la procédure s’enlise

Pour l’instant la stratégie d’Eternit fonctionne au moins partiellement  : deux juges du Suprême Tribunal Fédéral se sont prononcés quelques mois après les audiences publiques d’Août 2012, l’un - Carlos Britto - en faveur de l’interdiction de l’amiante et l’autre - Marco Aurélio Mello - en faveur des industriels de l’amiante, mais, presque deux ans plus tard, la procédure est enlisée.

Une situation
contradictoire

Eternit dispose encore d’appuis de haut niveau.
Lors des audiences publiques d’août 2012, les juges - appelés ministres - ont écouté les déclarations des représentants de six ministères : du Travail, de la Santé, de l’Environnement, de la Prévoyance sociale, des Mines et Energie, de l’Industrie et Commerce extérieur. Les quatre premiers se sont positionnés clairement pour l’arrêt de l’exploitation de l’amiante, les deux derniers en faveur d’Eternit.
Entre-temps, Eternit a été condamné plusieurs fois par la justice civile brésilienne, l’état de Minas Gerais a interdit à son tour l’amiante chrysotile et d’autres états s’apprêtent à suivre ou hésitent encore.

 


Le Brésil et l’amiante

Le Brésil est le troisième producteur (après la Russie et la Chine), le second exportateur (après la Russie) et le quatrième consommateur mondial d’amiante (après la Chine, l’Inde et la Russie).
Il provient d’une seul mine exploitée par la SAMA dont l’actionnaire principal est Eternit.
Eternit Brasil est aussi le principal transformateur d’amiante et financeur de l’institut du chrysotile brésilien.

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Article paru dans le Bulletin de l’Andeva n°45 (avril 2014)